Overblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Présentation

  • : Le blog de biloba31
  • : Souvenirs d'enfance à NANTERRE, impressions du moment, souvenirs de ma jeunesse,de mon service militaire à ALTKIRCH, école, collège, Lycée, Fac, description de lieux, mémoire familiale
  • Contact

Recherche

Archives

28 mars 2009 6 28 /03 /mars /2009 01:00

Vers 1962 ou 1963, mon frère reçu comme cadeau une guitare, simple et il se mit à gratter, gratter, jusqu'à faire des progrès sérieux, à l'aide d'une bonne méthode, et aussi pas mal d'écoute de 45 tours sur le tourne-disque appelé encore électrophone.

On le sait cet exemple peut-être contagieux  et très vite les doigts me démangèrent : ayant moi-même eu déjà une envie de gratter des cordes, mes parents m'avaient acheté quand j'étais plus jeune une cithare (1958).
Mais cet instrument duquel je ne pouvais  tirer que des notes égrenées, perdit  au bout de quelques temps son intérêt et j'avais d'autres chats à fouetter.

Donc quelques années plus tard je fut progressivement accroché par la guitare.


 

D'autre part mon frère entre temps s'était affilié à un groupe amateur et il s'en constituait pas mal à l'époque, en imitation des groupes célèbres dont les airs commençaient à se diffuser largement à la radio (la TSF comme disaient nos parents).

Il lui fut offert alors une guitare basse électrique.

Cet engouement devenait d'ailleurs un phénomène de société, et effectivement nous ne fûmes pas les seuls.

A l'époque donc après avoir quitté l'école Jules Ferry de NANTERRE, avec mon copain , nous étions depuis plus d'un an au Collège Paul LANGEVIN.

Il est de la nature humaine de procéder par exemple et par imitation, et bientôt mes parents m'achetèrent aussi une guitare car, moi aussi je m'y essayais sur la guitare simple de mon frère
.


 
Voyant cela mon copain   ne voulut pas être en reste et se fit payer une guitare par sa soeur.

Ma guitare à moi était une guitare à cordes nylon, rendant un son différent de celle qu'avait mon frère, ou encore de celle qu'avait mon copain  qui était elle une guitare style jazz, à la caisse découpée sur sa partie droite, afin d'être plus à l'aise pour jouer les notes les plus aigües.

Nous avions le désir de bien jouer, aussi nous décidâmes, que dès la rentrée scolaire de prendre des cours.

Il  y avait  à  RUEIL, près de la  Place du  Marché, donc en plein centre un marchand de pianos et d'instruments de musique divers accordeur de pianos de surcroît : il offrait à l'arrière de son magasin, après avoir passé une courette, un salon où un professeur de guitare, Monsieur THOMAS, nous dispensa pendant plus d'un an, tous les Jeudis, à 17 heures, des cours de guitare, que nous prenions, tous les deux, ensemble.

C'était un bon prof de guitare qui nous donnait beaucoup de conseils, était assez bavard aussi.

Il nous raconta un jour que, en temps que guitariste, il avait participé  au tournage d'un film sur Yvan le Terrible et qu'il devait tandis que le TSAR piquait une colère à vous exterminer une génération, jouer un air de balalaïka : problème : il ne connaissait pas cet instrument alors, il se débrouilla et l'accorda comme une guitare et parvint ainsi à remplir son contrat.


 

Il nous apprenait avec une méthode, nous faisant travailler des airs sur partitions, à charge pour nous, pendant une semaine, de travailler et de lui restituer, la séance suivante, l'acquis.

A l'époque , approfondissant le répertoire de l'instrument, nous détournant des musiquettes mon frère et moi, et guidés par Maman, nous écoutions des oeuvres pour guitares classiques interprétées par Andrès SEGOVIA, Ida PRESTI, Alexandre LAGOYA : un telle écoute, est indispensable et est en outre agréable.

Je me passionnais aussi pour le style de Django REINHARDT, dont je connu le style par  le copain de mon frère qui en possédait des disques.

J'appris donc à jouer Nuages, et ce fut Monsieur THOMAS, notre professeur de guitare qui nous enseigna la tablature de ce morceau.

Avec mon copain nous allions à nos cours de guitare lui en mobylette, moi en solex, les guitares dans leur housse,  quelque soit le temps, pluie vent neige, soleil ! Quelque soit l'aspect des nuages !

Puis un jour, Monsieur THOMAS dut cesser ces cours : il fut remplacé par un autre prof, aussi peu loquace que Monsieur THOMAS était disert : il nous donnait quelques tuyaux, puis, subitement se mettait à jouer tout seul, comme déconnecté du monde.

Cela dura quelques temps, puis à la rentrée suivante nous laissâmes tomber ces cours ...

Sans laisser tomber l'instrument !


 



 


Partager cet article
Repost0
16 novembre 2008 7 16 /11 /novembre /2008 22:19
Un jour de juin 1977, un samedi je crois, nous habitions alors avec ma femme  un deux pièces dans le 15ème arrondissement, avenue Félix Faure, mon fils aîné avait 9 mois.

Le téléphone ... au bout du fil, j'eu du mal à reconnaître la voix de l'épouse de mon copain, elle m'apprit sa disparition brutale : il avait mis fin à ses jours : c'était la tragique conséquence d'une dépression dont j'ignorais tout, que je n'avais jamais deviné, moi son meilleur ami.

Il était devenu mon ami depuis la fréquentation de la classe de seconde de fin d'études à l'école primaire Jules Ferry de Nanterre. Peu à peu nous devînmes inséparables car nous avions beaucoup de sujets d'intérêts communs : il s'intéressait à l'histoire mais excellait surtout en géographie. Le soir, en revenant de l'école, avant de rentrer à nos pénates respectives, à l'angle de la rue Daniel Becker et de la rue de la Source, combien de fois n'avons nous pas refait  le monde , discutant parfois pendant plus d'une heure, de philosophie, de politique, de religion.
Quittant l'école primaire, certificat d'études en poche, nous rentrâmes après un examen d'entrée au Collège Technique et Commercial du Vieux Pont, l'Ecole Paul Langevin.
Nous y suivîmes ensemble les classes de cinquième, quatrième, troisième et seconde, nous épaulant dans nos études, faisant nos devoirs ensemble, avec un certain succès puisque nos résultats s'améliorèrent jusqu'à devenir excellent, il est vrai que nos professeurs étaient exceptionnels...
Durant toutes ces années, nous trouvions également des jobs d'été ensemble, d'abord dans la zone industrielle de Nanterre, chez FTA (Fers Toles et Aciers), puis dans les compagnies d'assurances, dans le quartier Richelieu Drouot à Paris : les Assurances Générales de France, l'Urbaine et la Seine.
Toutefois il ne suivit pas la même voix que moi après la seconde : il commença à travailler fin 1965 dans le quartier Bellini, en bas de la Défense, à la Société Rank Xerox, je crois qu'ensuite il eut une période de chomage, mais je n'en suis pas sur.
Cependant cette divergence dans le cours de notre vie professionnelle  ne coupait pas les ponts entre nous : et nous nous voyions toujours.
Durant les évènements de Mai 1968, les congés qui nous furent imposés à l'un et à l'autre furent l' occasion de nous revoir quotidiennement.

Parfois pendant ma première année de Licence, il vint avec moi assister, hors cours, à des conférences d'un grand intérêt que donnait le Père Danielou à la Fac de Nanterre, sur les Prophétie d'Isaie , relative à la venue du Messie, le Christ.
Parfois nous allions tous les deux sur les pentes du Mont Valérien, lui en guise de veste revêtu d'une peau de mouton, tel le prophète  prêchant dans le désert...

C'est que à cette époque la Jeunesse voulait croire à quelque chose de transcendant, pour conjurer le destin que l'on voulait nous tracer soit vers la Sociète de Consommation soit vers la Société Radieuse du Socialisme triomphant en route vers le Communisme
.

C'est la jeunesse promise à une guerre future qu'elle devait faire fatalement dans sa vingtième année qui se révoltait.
Daniel et moi devînmes mystiques et retournions à la Messe ensemble tous les Dimanches. Chose curieuse, dans ce mouvement de Foi, alors que nous ne devions pas être les seuls jeunes gens à le vivre,  c'est pourtant à cette époque que nous voyions le sol se dérober sous nos pas : j'eu plusieurs fois le sentiment qu'une nouvelle page, ouverte sur l'inconnu s'ouvrait, que l'église semblait perdre ses convictions, son faste et son sacré, au fur et à mesure que les nôtres grandissaient.




 En 1969, mon copain se maria, puis, lui qui avait opté pour la nationalité française (ses parents étaient Italiens), fit son Service Militaire à Dijon. Il eurent un fils .
Quant à moi ce n'était pas merveilleux et je passais en seconde année de Licence de Sciences économiques après un examen oral ,qui ressemblait plus à une formalité administrative qu'à une véritable épreuve, en novembre 1968 : je pense que tous les étudiants, cette année là , furent admis : tellement les évènements avaient,  au sein de l'université,  perturbé le cours des choses.
Après son Service Militaire, mon copain  déménagea et  par la force des choses, lui travaillant désormais dans une  Compagnie Pétrolière, à temps plein,  nous nous vîmes  beaucoup moins souvent.

Moi, je redoublais ma seconde année en 1969, ne me présentant même pas à l'examen : j'étais sur d'échouer, je ne me sentais pas à ma place dans cette fac, avec ces cours magistraux et leurs effets de manches, et tout ces gens qui m'indifféraient et m'insuportaient.

En 1970, l'année commençait mieux pour moi, j'arrivais à mieux m'impliquer dans mes cours, mais pas d'amis ni d'amies d ailleurs.

Mais les cours étaient à nouveaux perturbés par des agitateurs violents "la gauche prolétarienne" avec en face le"gud" opposé, tout aussi violent.

Fin février 1970, un partiel dans l'amphi : au milieu de l'exam, des gauchistes débarquent, veulent empêcher le déroulement de l'épreuve : bagarres... coup de poings, pour quels motifs (des revendications révolutionnaires qui n'ont plus cours aujourd'hui les idoles ayant été déboulonnées de Pékin à Moscou).

Fin de l'épreuve, à la sortie : stupeur : le hall de la faculté : pulvérisé d'un bout à l'autre : bravo Messieurs.
Ces Messieurs, en plus si nous rouspétions nous menaçaient : ce n'étaient que des petits extrémistes qui voulant jouer à la révolution des nantis pouvaient tuer : à quoi cela a-t'il avancé ?

Dégouté définitivement, je décidai 10 jours après de ne plus y remettre les pieds et j'annonçai ma décision à mes parents.
Je pris un travail pour 3 mois, résiliais mon sursis, début avril fis mes 3 jours à Blois, le 20 Mai je reçu ma feuille de route : je devais être au Quartier Plessier à Altkirch dans le Haut-Rhin le 2 juin 1970 : j'y fus.( Huitième Hussard).
Je fus libéré le 28 Mai 1971 ....

Ce service militaire , je le vécus comme un enfermement : déjà j'ai naturellement un sentiment d'infériorité du fait de mes inaptitudes physiques, et mes classes furent un cauchemar, le parcours du combattant, avec ses fosses et ses échelles, ses sauts vertigineux me révèlèrent mon manque de confiance en moi, que ce milieu, de part ses brimades , ses ordres stupides ne m'aidèrent pas à surmonter.
Malgré tout je m'adaptais, et fin juin 1970, les classes terminées et la perspective de faire un service plus court me firent entrevoir le bout du tunnel (nos chers députés votèrent courant juin en plusieurs fois la réduction du service militaire qui de 16 passa à 12 mois).
Début juillet je fus versé au 1er escadron de ce régiment de cavalerie blindée de reconnaissance, en qualité de ... secrétaire d'échelon : mon arme : une machine à écrire.
Taper des rapports sur l'état des engins blindés de l'escadron, parfois des rapports d'accident (dont un fameux qui coutât la vie à un habitant d'Altkirch), bref une routine d'employé de bureau teintée de discipline militaire, entrecoupée de séances de tirs à Hirtzbach, et aussi de manoeuvres, soit à Bitche, soit à Valdahon.
Je pris quelques permissions de 36 heures (moi de 500 km de mon domicile : 489)
départ le samedi matin de la caserne, autorail, correspondance à Belfort direction Gare de l'Est à Paris atteinte en fin d'après-midi, métro. Bonjour Papa et Maman . Une nuit de sommeil, un Dimanche écourté pour retrouver vers 21 heures le train de nuit, avec changement à 5 heures du matin à Belfort, arrivé à la Caserne encore endormie avant 6 heures. Ne pas réveiller les copains de chambrée encore dans les bras de Morphée, puis le clairon du réveil et reprise de la routine militaire.
 Heureusement j'avais aussi droit à des permissions de plusieurs jours que je pris vers avril 1971.
Début juin 1971, je retrouvais la maison et mes parents : Papa agé bientôt de 63 ans était à la retraite, Maman 50 ans, continuait à travailler , bien que son travail se modifiait du fait  de la réforme des services religieux : moins de faste, moins de chants ...
De retour à la maison je voulais un peu me changer les idées, et en grand secret, je voulais partir, quitter tout ce milieu, voir autre chose : un matin de ce mois là, je pris quelques affaires un sac à dos, le minimun  que j'avais préparé  en secret, et je partis à pied, pour l'aventure, vers le sud , je ne sais où ... une promesse que je m'étais fait à moi-même durant l'armée ...

Tout en partant je prenais conscience que je pouvais faire du mal à mes parents.
Je partais en laissant mes parents seuls : mon frère et ma soeur vivaient déjà ailleurs.
Je marchais,  marchais....,le Mont Valérien, Suresnes, Saint-Cloud, Ville d'Avray, des tentatives spontanées d'automobilistes voulant me prendre en stop que je déclinais, voulant rester seul ... puis le remords me prit avec un sérieux boitillement qui commençait à me gêner, je pensais à mes parents plus qu'à moi j'imaginais leur désespoir et leur chagrin, alors je fis demi tour.
J'arrivai à la maison : Maman était déjà là, elle me reprocha mon absence et me demanda où j'étais passé : je ne lui dis pas, ni jamais, et je trouvais son ton et ses reproches déplacés, beaucoup d'incompréhension de sa part de qui j'étais et de ma souffrance profonde.
Je ne lui dis jamais, ni à elle, ni à mon père, ni à mon frère, ni à ma soeur ...
Pour couper court aux injonctions permanentes que mes parents me faisaient de trouver un travail je décidais de recontacter la compagnie d'assurance où j'avais travaillé 3 mois avant de partir à l'armée : ils me prirent avec des pincettes ...
J'y restais jusqu'à fin septembre, n'ayant signé qu'un contrat à durée déterminée de 3 mois.
 A la fin de ce mois d'ailleurs, notre pauvre chien Youcki, un grand fox terrier mourut : du fait d'un diabète, il était devenu tres gros et buvait sans arrêt, nous lui faisions des piqûres d'insuline.
Avec ma soeur  nous partîmes par un octobre magnifique , sec, aux couleurs éclatantes, en 4 L.
Orléans, la Sologne, Tournoël, l'Auvergne, Le Quercy, Puy Mary, Clermont-Ferrand, Cajarc, Le Tarn, Les Gorges du Tarn, la Lozère, Le Bourbonnais, Vichy, du film super 8, puis retour.
Je restais ensuite à la Maison, mais j'allais souvent avec ma soeur , mon frère et avec un jeune couple (un copain de régiment à lui qu'il  avait retrouvé par hasard en faisant ses courses à Rueil) et leur petite fille  à la Piscine de Rueil ou à celle de Chatou.

Vint la période de Noël, un anniversaire et Le jour de l'An.

Le 30 décembre 1971,  j'étais avec papa à la maison et celui-ci était en train d'écrire une lettre au gérant de location de la maison que nous occupions à Nanterre. Tous ces derniers jours il était préoccupé par notre consommation d'eau que nous devions règler au gérant et il craignait que celle ci intègre la consommation d'une autre maison desservie par la même conduite.

C'est en voulant rédiger un chèque qu'il fut pris soudain d'une violente douleur à la tête. Je m'en rendis compte immédiatement et lui parlai pour le rassurer, mais il fut pris de  nausées. Je le sortis de sa chaise tant bien que mal et le mis dans un fauteuil incliné tout en lui parlant en le rassurant, et j'appelai immédiatement par téléphone les secours.Mais il rentrait déjà dans le comas.
Les secours arrivèrent très rapidement et mon père fut transporté immédiatement à l'Hopital de Nanterre. Malheureusement il ne reprit pas connaissance et mourut le 4 janvier 1972 dans l'après midi. Il avait 63 ans.
Papa fut enterré à Varreddes en Seine et Marne, pays d'origine de sa mère, ma grand mère paternelle  que je ne connus jamais puisqu'elle mourut en 1939;
 Il rejoignit sa Mère et ma petite cousine   décédée petite suite à une épidémie de fièvre typhoïde au début des années cinquante à Toulouse, où mon Oncle , le frère de Papa, travaillait comme ingénieur en aéronautique...


Partager cet article
Repost0
14 novembre 2008 5 14 /11 /novembre /2008 21:50
J'ai vu il y a environ un an sur Arte un document sur l' assassinat du Président  Kennedy : je me souviens de cette soirée du  22 novembre 1963, le temps était clair et glacial comme une nuit de début avril.
A l'époque nous n'avions pas la télévision.
J'étais seul avec Papa à la maison , Maman n'était pas encore revenu de son travail ( elle revenait très tard et était tributaire des transports en commun). Elisabeth devait être chez sa copine Françoise, et Patrice chez son copain Francis ( Françoise et Francis habitaient l'une en face de l'autre, rue de Garches).
Je pense qu'il devait être aux alentours de 10 heures du soir, quand soudain nous entendîmes Patrice d'un pas vif qui revenait et ouvrit la porte.
Tout de suite il nous dit, les yeux écarquillés de l' incroyable évènement qu'il allait nous annoncer : " Kennedy a été assassiné ! ".
Nous n'en revenions pas !
Toute la soirée nous fîmes des supputations sur ce qui risquait d'arriver : Guerre ? et qui pouvait bien être le commanditaire ?
Puis nous passâmes le reste du temps à écouter la Radio où les envoyés permanents Jacques Sallebert et Michel Anfrolles se relayaient en direct et commentaient les réactions sur place et les premières hypothèses ...
Le lendemain, au collège Paul Langevin, nous nous formions en petits groupes et émettions des hypothèses sur ce qui allait se passer. Nous voyions bien que nos profs en faisaient de même.
Nous en parlâmes avec eux en cours tant l'évènement était soudain, bouleversant et déstabilisant.
Partager cet article
Repost0
14 novembre 2008 5 14 /11 /novembre /2008 21:41
Deux fois de suite, les mois d'août 1961 et 1962, nos parents m'envoyèrent passer mes vacances au bord du Lac d'Annecy, à Saint-Jorioz, dans un camp de jeunesse administré par les Eclaireurs de France.
La première année, Papa m'avait accompagné et passant les journées avec nous pris plusieurs fois le fameux bateau ; il surprit plus d'une fois mes nouveaux camarades par sa connaissance du matériel et l'estimation de la vitesse de ce beau bâtiment et le baptisèrent "l'homme universel".
Pour dormir, il bénéficia d'un hébergement offert par la Mère d'un collègue de travail de Maman, qui habitait précisemment le village de Saint Jorioz.
Puis quatre jour après, il retourna à Nanterre.


Le camp était divisé en  quelques sous camps regroupant  plusieurs unités dans des tentes de l'armée américaine . Chaque tente était un chapiteau  fermement dressé sur un pilier central , la toile tenue à sa périphérie par des cordes maintenues par des piquets : cela  accueillait une dizaine de gamins qui pouvaient, en son centre s'y tenir debouts.
Le sol était un caillebotis. Nous dormions dans des lits de camps.

 1961 ou 1962 quelques tentes du camps de toile de SAINT-JORIOZ : an fond, la Tournette


Parfois le matin, la lumière du soleil entrant par un interstice, permettait à certain de lire leurs illustrés tout en restant au lit, en illuminant les pages de leurs comics au moyen du rebond de la lumière astrale sur un papier journal.

La vie dans ces camps était assez libre (mais il n'y avait que des garçons toutefois hormis les filles et épouses du personnel encadrant le camp et qui permis à certains quelques amourettes) : on nous laissait le loisir d'occuper nos journées dans des activités de notre choix, du macramé au sport de combat, y compris la liberté de ne rien faire.
Le midi, repas dans une sorte de self géant, puis vaisselle au dehors .. ali... allo ...
Le camp était situé au bord du Lac d' Annecy, et possédait sa propre plage.
C'est là que j'appris à nager, seul, comme un grand, en 1961, et que j'eu mon premier coup de soleil mémorable qui me mit le dos à vif au cour d'une ballade en canoe à dix  lorsque un jour nous fîmes le tour du Lac.
J'y appris aussi la construction du mur de Berlin, et l'année suivante, la mort de Marylin.
J'avais bien sur de nombreux camarades, dont un dont je me souviens  particulièrement et que l'on surnommait "Bougie", car c'était un Français d'Algérie originaire de cette ville de la côte algérienneappelée maintenant BEJIAIA .
La première année, il était à fond pour le Général car, comme tous les Français de là bas il ne doutait pas de la ligne Algérie française qui était suivie.
Le retrouvant l'année suivante, sa vision du Général avait radicalement changé, et ce dernier n'était plus à ses yeux qu'un "..... "  "Il avait renié sa parole" !
Ce copain Bougie nous racontait les péripéties d'un gamin de son âge dans la ville de Bougie, sur la côte algérienne, notamment qu'ils avaient bricolé, sur les guidons des petites mobs italiennes très bruyantes et très en vogue à l'époque, l'emplacement pour y installer des fusils mitrailleurs.
Il y avait aussi un français de Centrafrique que je trouvais tir au cul , raciste et qui avait connu Erol Flynn . Egalement un jeune martiniquais, remarquable sprinteur, mais imbu de sa personne, et méprisant,  sans doute pour compenser les propos  plus que regretable que lui adressait Monsieur centrafrique.

 SAINT JORIOZ AOUT 1961 AU FOND LES DENTS DE LANFONT CLICHE PERSONNEL


La soirée se terminait  par l'extinction des feux, comme à l'armée.
Des moniteurs veillaient au respect scrupuleux de cette consigne.
Au préalable nous avions souvent eu droit si le coeur nous en disait à une séance de cinéma  à ciel ouvert, où les sièges étaient constitués par des poutres, sans dossier : il fallait donc que la météo soit bonne.
C'est là que je vis pour la première fois les films tels que "Des souris et des hommes", et "Les raisins de la colères" d'après les romans de John Steinbeck (ça m'a marqué !).

Au cours de ces mois de vacances, deux virées en montagne étaient prévues.
Il s'agissait d'excursionner, soit au Mont Veyrier, soit au Parmelan, soit à la Tournette.
Une expédition plus lointaine, dans la vallée du Mont Blanc, au glacier d'Argentière était aussi prévue ...

Les excursions duraient un jour, sauf celles qui nous conduisaient à CHAMONIX où nous allions en chemin de fer depuis Annecy à cause de la distance, ou celle qui nous amenait à la Tournette car, le sommet, situé à 2500 mètres d'altitude, dominant le Lac  nous imposait deux demi-journées de marche entrecoupées d'une nuit à passer au chalet des Aup, situé à 1500 mètres d'altitude, où l'on fabriquait du reblochon (odeur puissamment tenace), et où les vaches se faisaient saillir.

La première année l'excursion à la Tournette se solda par l'arrivée au sommet sous un ciel nébuleux et orageux et au lever du jour le ciel était bouché et nous ne vîmes rien du tout: je veux parler ici du panorama.
Partant de Saint Jorioz, la veille en matinée nous prenions le célèbre bateau "Proud Mary" avant la lettre assurant les transports sur le Lac, puis nous arrivions, après une brève traversée à Sévrier je crois, au pied du massif de la Tournette.

Nous étions une dizaine de gamins et un moniteur chargés comme des mulets avec nos sacs à dos, ravitaillement, couchage, boisson .
La dure grimpette commençait et au fur à mesure que les minutes, puis les heures (oui les heures ..) passaient, les conversations de petits comités se faisaient plus rares, plus brèves, plus essentielles : d'anodins les sujets de conversation avaient évolué vers la survie,...  et plus haletantes.
 Nous traversions des bois, découvrant soudain des prairies, avec parfois des blocs rocheux moussus nous servant de marchepied, ainsi que quelques racines affleurant et vibrant sous nos pas.
Au bout de quelques heures, une première halte : ravitaillement : nous en avions besoin : nous étions tous en nage : pain et chocolat plus eau cela faisait du bien.
Je peux vous dire que les petits gros voyaient leurs réserves lipidiques diminuer singulièrement.
Puis l'ascension reprenait, lourde , un golgotha long comme le jour, martelé par la cadence de la chiourme de notre coeur soutenue par le rythme des pas de nos camarades de souffrance : peu à peu nous marchions à l'unisson ; souvenez vous du film Benhur : les rameurs attachés devant supporter la cadence du maître de nage martelé sur un rythme infernal : boum boum boum boum boum boum ....
De ces ballades où l'on découvrait soi-même sa propre résistance, sa faculté de pousser l'effort plus loin, j'en ai gardé pour toujours le goût de la peine, et la connaissance que je peux toujours reculer mes limites, jusqu'au seuil du malaise.

En fin d'après midi, nous arrivions au Chalet des Aup, relais rustique, une ferme et ses troupeaux, très fréquentée, dans le tintinabulement des cloches des troupeaux, au beau milieu des verts alpages d'une pelouse moussue et caressée par le vent et le soleil, où l'on fabriquait une quantité non négligeable de reblochon : on nous fit visiter le lieu de l'affinage, odeur très cuivrée et agressive à l'instar d'une charge de cavalerie comme aurait pu dire Emile Zola.
 Au prélable nous avions pu voir la cuisson du lait jusqu'à obtention d'une pâte, pressée dans un torchon, et qui devait devenir le futur fromage.

Le repas que nous prîmes le soir, nous l'avions dans nos sacs à dos ou dans celui de notre moniteur, je ne sais plus. Puis dodo dans une grange, dans nos duvets couchés sur la paille d'une étable.
Réveil à trois heures du matin : rhabillage express et collation rapide, puis sortie hors de la grange dans la fraîcheur de la nuit bleue la tête encore garnie de sommeil et reprise de l'ascension vers ce sommet diabolique , la tournette que l'on appelait aussi "la Chaise".
C'est que nous devions être là haut pour assister au lever du soleil, en ce mois d'août (ancienne heure).
L'ascension reprenait donc, d'abord au même rythme que la veille, mais dans un paysage différent : moins de bois , des grandes prairies d'herbe rase, et une pente plus abrupte. Puis après je ne sais combien de temps le chemin était plus chaotique, rocheux, escarpé, nous longions à présent des précipices et le moniteur attirant notre attention sur ce danger veillait à ce que nous restions bien le long de la parois rocheuse luisante et humide alors que le bleu de la nuit palissait.

Le sommet était en vue : pour l'atteindre, il fallait gravir un chemin complètement rocheux, dessiné au flanc des derniers décamètres du sommet. Là cette seconde année, à la vue de cette proximité nous partîmes en ordre dispersé, comme une volée de moineaux voulant soudainement s'affranchir.
Il faisait jour à présent un jour gris comme du ciment, mais sans brume.
J'étais au milieu du peloton, lorsque  je vis un groupe de randonneurs descendant du sommet, la mine déconfite. Puis les rumeurs, un de nos camarades que je connaissais bien aurait été blessé par une chute de pierres.
Notre moniteur sans perdre son calme était très préoccupé.
Bientôt nous apprîmes ce qui était arrivé.
Le groupe de randonneurs descendant que nous venions de croiser dans ce boyau étroit que formait la fin du chemin à quelques mètres du sommet avait provoqué une chute de pierres et mon camarade avait eu le crâne ouvert : il était dans l'inconscience et devait bientôt sombrer dans le comas.
D'urgence d'autres randonneurs purent joindre un poste de secours et un hélicoptère militaire de la base d'Annecy fut requis pour évacuer le plus vite possible le blessé vers l'hôpital.
Cependant l'hélicoptère, réquisitionné pour une autre mission urgente ne put venir : on nous dit alors que les secours viendraient de Chamonix, qui à vol d'oiseau était proche.
A présent le soleil se levait et letemps était magnifique.
A l'opposé du Lac, qui semblait minuscule vu de là haut, on découvrait la chaîne du Mont Blanc, agrémentée de quelques nuages gris sombre, la vue était formidable de grandeur.
Et soudain, je vis, comme un petit oiseau sombre, approcher, venant de là bas, de Chamonix l'hélicoptère qui venait nous secourir et ramener notre infortuné camarade à l'hopital.
Alors, soulagés, nous prîmes le chemin du retour, en dévalant les pentes , sans pouvoir nous arrêter, sans halte cette fois, sauf pour nous regrouper, et nous assurer que personne ne manquait à l'appel.

..............

Le comas de notre camarade fut long et entrecoupé de délire. Sa blessure était grave. Nous sûmes que durant cette phase d'inconscience il nous appelait ,  citant nos noms ...
A la sortie du comas il manifesta le désir de nous voir depuis sa chambre d'hôpital à Annecy.
Aussi, une dizaine de jours après l'accident nous nous retrouvâmes à quatre ou cinq, autour de son lit ; il avait le crâne bandé, mais était souriant et nous parla avec grande amitié.
Nous apprîmes que ce garçon n'avait que sa mère et cela nous peina grandement  encore plus , rétrospectivement.
Nous étions tous rassurés, mais très émus, et touchés de son témoignage inconscient.
En tous les cas une plus grande solidarité se manifestait désormais entre nous, le reste du séjour.
Certains camarades mirent de côté le mépris (soit pour la couleur de leur peau, leur aspect physique où leur inaptitude au sport ) qu'ils affichaient les uns envers les autres antérieurement à cet épisode tragique : en effet ce camarade nous avait, durant son inconscience, réuni. D'autre part là haut, nous avions réalisé que chacun d'entre nous aurait pu être la victime de ce tragique accident de montagne.

Tout ainsi finissait bien.

Je suis retourné deux fois à Annecy et autour de son Lac :d'abord en septembre 1972, en vélo lors d'une grande randonnée que je m'étais offert, puis en mai 1976, avec Marie-Claude, et Jean-Baptiste, encore caché, cette fois en touriste.

J'aime beaucoup cet endroit.



Partager cet article
Repost0